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5 septembre - La minute historique

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Message  Bianca Jeu 6 Sep - 13:58

5 septembre 1661. Louis XIV fait arrêter Fouquet par d'Artagnan. À lui le pognon, maintenant !

Le jeune roi a de gros besoins d'argent. Notamment pour construire Versailles. Son surintendant se sucre trop ? Alors il le vire.

Imaginons que François Hollande fasse arrêter Moscovici par le directeur de la PJ parisienne, Christian Flaesch, pour enrichissement personnel. Vous aurez alors une idée du coup de tonnerre qui résonne le 5 septembre 1661 quand Louis XIV envoie d'Artagnan s'emparer de Nicolas Fouquet. Sauf que notre ministre des Finances n'est coupable de rien, tandis que le surintendant du Roi-Soleil s'en est mis plein les fouilles. À dégoûter un Bongo ou un Sassou-Nguesso. En arrivant aux affaires, le jeune roi Louis XIV a pourtant bien tenté d'avertir Fouquet, mais il n'est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. Le surintendant continue à détourner des sommes considérables des caisses de l'État au grand dam du roi, qui, lui aussi, a de gros besoins. Il compte agrandir la maison de campagne de Versailles léguée par son père, Louis XIII. Une galerie des glaces, ça coûte bonbon. La sueur de plusieurs millions de paysans ! Et ses maîtresses ! Il faut bien les couvrir de cadeaux royaux. Bref, si, dans le royaume, il doit n'y en avoir qu'un pour faire caisse commune avec les finances de l'État, c'est bien le roi, non ?

Donc, le jeune Louis XIV, 23 ans, est bien décidé à éliminer Fouquet, maintenant que Mazarin est mort. Lui aussi sait se montrer retors. Durant de longs mois, il prépare son coup ; depuis le mois de mai 1661 exactement. Dans les instructions écrites qu'il rédigera quelques décennies plus tard à l'intention du dauphin, il évoque Fouquet : "Il ne pouvait s'empêcher de continuer ses dépenses excessives, de fortifier des places, d'orner des palais, de former des cabales et de mettre sous le nom de ses amis des charges importantes qu'il leur achetait, à mes dépens, dans l'espoir de se rendre bientôt l'arbitre souverain de l'État." En effet, ce que le roi craint aussi, c'est que son ministre puisse un jour lui chiper le pouvoir. Ne s'est-il pas allié au parti dévot qui avait tenté de l'empoisonner quelques années plus tôt ? Bref, quand le souverain accepte d'assister à la fête extravagante organisée par Fouquet le 17 août 1661 au château de Vaux-le-Vicomte, les jeux sont déjà faits depuis longtemps. La présence royale ne sert qu'à endormir la vigilance du surintendant.


"Ordonnances de comptant"

Déjà, quelques semaines plus tôt, le roi avait fait comprendre à Fouquet qu'il serait bon qu'il vende sa charge de procureur général pour renflouer le trésor royal avec la somme qu'il tirerait de la vente. C'est là que l'on constate la ruse de Louis XIV, car la charge de procureur général rend son possesseur redevable juridiquement uniquement devant le Parlement de Paris. Or celui-ci est tout acquis à Fouquet. Quand ce dernier sera arrêté, Louis XIV pourra donc réunir un tribunal d'exception à sa botte. Le surintendant se doute bien de la manoeuvre, mais ne peut pas refuser de vendre sa charge. Deuxième manoeuvre de Louis XIV : en plein conseil, il impose la suppression des "ordonnances de comptant" utilisées par Fouquet pour couvrir ses dépenses secrètes, et Dieu sait si elles sont élevées. "Je ne suis donc plus rien ?" s'écrie-t-il en entendant la demande du roi. Mais, là encore, il ne peut s'y opposer. Désormais, le surintendant sait qu'il est dans la ligne de mire. Certains de ses amis lui conseillent de fuir. Cependant, comme la grenouille de son ami La Fontaine, il reste gonflé de son importance, croyant n'avoir rien à craindre. Au point d'organiser la fastueuse réception de Vaux-le-Vicomte au cours de laquelle le roi envisage de le faire arrêter. Mais cela ne serait pas digne de lui, lui explique sa maman. Alors le jeune souverain reporte l'estocade au 5 septembre 1661, à l'occasion des États de Bretagne, à Nantes. Il y convie Fouquet, qui n'a d'autre choix que de s'y rendre, même terrassé par une fièvre quarte, probablement déclenchée par une crise de paludisme.

Prudent malgré tout, le surintendant s'installe dans une maison reliée à la Loire par un souterrain, histoire de pouvoir s'enfuir en cas d'arrestation et rejoindre en bateau Belle-Île, qu'il contrôle. Le 4 septembre, Louis XIV loge dans le château de Nantes. À l'abri des regards, il prépare les documents nécessaires à l'arrestation de Fouquet, qu'il prévoit pour le lendemain à la sortie du conseil. Qui pour arrêter Fouquet ? Louis XIV se méfie de son capitaine des gardes, grand ami du surintendant, préférant faire appel au sous-lieutenant de la compagnie des mousquetaires : d'Artagnan. Il le convoque, fait semblant de s'intéresser à sa compagnie pour donner le change aux courtisans, parmi lesquels pourrait se trouver un espion de Fouquet, puis il le fait venir dans un cabinet privé sous un prétexte anodin. Là, il le met au courant de sa mission tout en lui imposant de garder le plus grand secret.


Bannissement du royaume

Le lendemain matin, à 7 heures, Fouquet se rend donc au conseil du roi, ne se méfiant pas des mousquetaires présents, qu'il pense convoqués pour la chasse du roi. Vers 11 heures, le souverain disperse le conseil. Laissons-lui la parole (extrait d'une lettre envoyée le jour même à sa mère, Anne d'Autriche) : "Enfin, ce matin, le surintendant étant venu travailler avec moi à l'accoutumée, je l'ai entretenu tantôt d'une matière et tantôt d'une autre, et fait semblant de chercher des papiers, jusqu'à ce que j'aie aperçu par la fenêtre de mon cabinet Artagnan dans la cour du château, et aussitôt j'ai laissé aller le surintendant, qui, après avoir causé un peu au bas de l'escalier avec La Feuillade, a disparu dans le temps qu'il saluait le sieur Le Tellier ; de sorte que le pauvre Artagnan croyait l'avoir manqué, et m'a envoyé dire par Maupertuis qu'il soupçonnait que quelqu'un lui avait dit de se sauver ; mais il le rattrapa dans la place de la grande église et l'a arrêté de ma part, environ sur le midi." Fouquet ne se défend même pas. Tout se passe en douceur. Un observateur du Raid envoyé sur place prend des notes.

En revanche, le procès ne se déroule pas selon la convenance du roi. Les juges de la cour d'exception réunie pour l'occasion ne supportent pas les pressions exercées par le jeune souverain pour obtenir la peine capitale. "La cour rend des arrêts, pas des services", s'exclame aigrement le juge d'Ormesson, qui n'a aucun lien de parenté avec le juge Courroye. Après trois ans d'instruction, Fouquet est effectivement reconnu coupable de péculat, mais voilà, seulement neuf magistrats sur vingt se prononcent pour la peine de mort. L'accusé est simplement condamné au bannissement du royaume et à la confiscation de ses biens, presque l'équivalent d'un acquittement. Furieux, Louis XIV ose ce qu'aucun roi de France n'a fait avant lui et ne fera après lui : il utilise son droit de grâce pour aggraver la peine ! Il transforme le bannissement en emprisonnement à vie. Nicolas Fouquet passera finalement les seize dernières années de sa vie emprisonné dans le fort de Pignerol. Débarrassé de Fouquet, le Roi-Soleil peut alors détourner toutes les richesses de la France à son seul profit, laissant un pays exsangue à sa mort en 1715. Autres temps, autres moeurs.
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